Rencontre avec Cathy Closier, fondatrice de Season

Season, Season Market, le Café Crème, le Café de La Poste… Tous ces restaurants parisiens, où l’on a inlassablement envie de revenir, ont été créés par la même personne. Cathy Closier a le chic pour imaginer des lieux bankables. Rencontre.

Qu’est-ce qui vous fait vous lever du bon pied le matin ?

Mes enfants bien sûr ! Et d’aller travailler, avec l’excitation des projets, des choses à mettre en place… Là, nous travaillons avec mon équipe sur l’évolution de Season Market. Nous n’avons pas encore de date car nous attendons la livraison des meubles, mais nous allons le transformer en appartement où l’on pourra tout acheter, du canapé dans le salon à la vaisselle dans la cuisine et des draps de la chambre aux produits de beauté de la salle de bains.

Vous avez fait éclore votre premier café à 26 ans. Dans quel terreau avez-vous poussé pour que cela soit possible ?

Je suis issue du milieu de la mode. Mais en sortant de l’école, ne trouvant pas de boulot, je suis allée bosser dans une chaîne de restaurants. Puis partie un an à New York. Je suis revenue parce que mes ex patrons étaient prêts à m’aider à ouvrir ma propre affaire. J’avais beaucoup travaillé pour eux, ils sentaient que j’en étais capable… C’est un conte de fées, mais pas un hasard : j’ai toujours voulu entreprendre, j’ai toujours eu une intuition très forte. Mes parents eux-mêmes ont eu un hôtel et beaucoup travaillé. “Rien ne résiste au travail”, voilà la phrase que j’ai beaucoup entendu.

A l’époque, j’imagine que certains ont cherché à vous dissuader… Comment avez-vous réagi ?

Mon premier banquier m’a expliqué que mon projet était viable, que le dossier était bon, mais qu’il n’investirait pas sur moi parce que j’étais une femme de 26 ans, que je voudrais faire des enfants… Cela ne m’a pas abattue, au contraire, j’ai juste eu envie de montrer à cette personne que j’y arriverai. J’ai toujours eu à coeur de montrer que j’étais aussi capable qu’un homme de réussir. C’est aussi pour ça que je suis sensible à la cause des jeunes entrepreneuses.

Aujourd’hui, Season est “the place to be” à Paris. Qu’est-ce que cela déclenche chez vous?

C’est beaucoup d’émotion. J’y ai mis tout ce dont je rêvais, et j’ai eu très peur que cela ne marche pas donc c’est une reconnaissance très touchante. Je ne m’attendais pas à ce succès, j’y croyais mais je n’imaginais pas que ça marcherait à ce point. Le conte de fées se poursuit ! Mais pas au quotidien : ce n’est pas facile, cela représente beaucoup de sacrifices personnels, beaucoup de travail, de soucis en permanence. Je n’ai pas envie que les gens rêvent de la réussite.

Avez-vous peur parfois ? Comment cela se traduit-il ?

Je ne dors pas, je perds dix kilos, quelques larmes parfois… Mais par contre, je fonce toujours. Je peux avoir des moments d’abattement, mais une heure après, le “si ça marchait ?” revient. C’est un grand ascenseur émotionnel. Je pense que c’est sain d’avoir peur, il ne faut pas être trop sûr de soi. J’ai eu un restaurant, qui s’appelait le Café Rouge. 500 m2, deux étages en mezzanine… Un endroit magnifique, mais je n’ai pas suivi mon intuition, j’ai signé alors que je ne le sentais pas. J’ai frôlé la faillite. Rien n’est jamais acquis.

Quelles sont vos bottes secrètes pour réussir toutes vos vies parallèles?

L’organisation ! Avec les enfants, c’est militaire, chronométré. Les journées ne se passent jamais comme prévu. Dans mon équipe, ils ont toujours l’impression de me courir après… Les rendez-vous importants sont dans mon téléphone, tout le reste dans un cahier : je fais des listes pour tout, sinon, j’oublie.

On vous donne l’occasion de percer les secrets de trois femmes que vous admirez. Qui seraient les heureuses élues?

J’adorerais rencontrer la PDG de Facebook, Sheryl Sandberg. Elle a une histoire incroyable ! Tina Kieffer aussi : je suis admirative de son initiative auprès des enfants du Cambodge. Je me dis qu’à la retraite, je ne ferai que ça : m’impliquer dans ce genre d’association. Après, ce ne sont pas forcément les femmes qui réussissent qui m’attirent, je suis plus touchée par celles qui se battent pour vivre. En ce moment, les instastories de Care me prennent aux tripes. Pour moi, ce sont elles, les héros.

Crédit photo : Alix de Beer